J'utilise le shio-koji tous les jours dans ma cuisine depuis bientôt 3 mois (merci Magali pour le partage !), et j'en ai même fait en France cet été pour faire découvrir la chose à ma maman - qui a adoré.
Mais avant de vous parler du shio-koji, je dois vous parler du koji. Base de la cuisine japonaise, il est le point de départ de toutes les fermentations japonaises : miso, sake, shoyu, tamari, mirin. Le koji est à ces préparations diverses ce que le levain est au pain : une matière première qu'on a fait fermenter. Pour le levain de pain, c'est de la farine (et de l'eau) qui est naturellement ensemencée par les levures et bactéries ambiantes. Pour le koji, c'est du riz cuit (donc avec de l'eau) auquel on inocule une levure spécifique, l'Aspergillus Orizae.
Le koji est donc un "levain de riz". Ou même de soja ou de blé, selon l'usage qu'on en fera (le sake se fait sur du koji de riz, mais le miso sur du koji de soja).
Je ne parlerai ici que du koji de riz, celui que j'utilise. J'achète mon koji tout prêt : le riz a été cuit, puis ensemencé avec l'Aspergillus Orizae (koji-kin). Il a fermenté, et on l'a déshydraté.
Il en resulte des grains de riz fermentés qui sentent délicieusement bon, et qui me servent à fabriquer mon shio-koji.
Shio-koji, nous y voilà.
Shio, ça veut dire sel. Et koji, ça veut dire levain de riz. Qui dit sel dit condiment, exhausteur de goût (excitant du système nerveux également mais j'en mets le minimum requis), et qui dit levain dit alimentation vivante, transformation naturelle des aliments, de leur goût, de leur digestibilité, et fabrication naturelle de nutriments.
Avec tout ça, pas étonnant que le koji ait été élevé au rang officiel de "Levure Nationale" au Japon !
Oui mais le shio-koji, ça ressemble à quoi ?
Le shio-koji, ça ressemble à ça.
- Donner du goût. Riche en enzymes, le shio-koji apporte une saveur umami aux aliments, qui signifie littéralement "goût délicieux", très difficile à décrire..
- Prédigérer les aliments. Dit comme ça c'est un peu dégueu, mais vous allez comprendre : les enzymes présents dans le koji décomposent les éléments nutritifs des aliments en éléments simples. Ainsi, les protéines passent de l'état complexe à celui d'acides aminés (dont le glutamate, responsable du goût umami dont j'ai parlé ci-dessus). De la même manière, les glucides complexes sont décomposés en glucides simples. Or on l'a déjà vu ici (pour les sucres) et là (pour les protéines), l'organisme n'assimile, ne se nourrit que d'éléments simples ; le processus de digestion ne consiste qu'en une dégradation systématique (et plus ou moins bien faite) des éléments complexes. Utiliser du shio-koji dans son alimentation permet donc de soulager le travail digestif et d'améliorer l'assimilation des nutriments.
- Diminuer drastiquement son apport en sel. Il devient inutile de saler une préparation, pas tant parce que le shio-koji contient déjà du sel que parce qu'il développe cette fameuse saveur umami complexe et irrésistible.
Concrètement, on en fait quoi ?
Mon usage préféré c'est de l'utiliser comme seul ingrédient d'un assaisonnement de salade composée. Je prépare ma salade à l'avance (disons 30 min avant le repas), j'y ajoute 1 cuillère à soupe de shio-koji, et je laisse les enzymes faire leur travail. L'aspect, le goût, et le contenu nutritif seront bonifiés ! (voir photo en fin d'article).
J'aime aussi beaucoup m'en servir d'agent salant dans une sauce à base de tahini (par exemple ici), ou d'un houmous.
Au Japon on s'en sert également pour faire mariner de la viande ou du poisson avant de les cuire. Ça, parait-il, met le goût en valeur, mais je trouve pour ma part dommage de tuer les enzymes avec la cuisson qui suit.
Bref le shio-koji est devenu incontournable dans mes préparations. Je sais bien que vous n'allez pas trouver le trouver dans vos rayons occidentaux, mais je suis sûre qu'on peut trouver du koji déshydraté sur internet.
À partir de là, pour ceux qui se sentent l'âme aventureuse, voici la recette du shio-koji.
Il vous faut 500g de koji déshydraté (sur base de riz blanc ou riz complet, au choix). Il faut également entre 50 et 150g de sel de mer non traité (soit entre 10 et 30% du poids total du koji - j'en mets 10%). Et de l'eau de qualité.
Commencez par placer le koji dans un bol assez grand, et ajoutez-lui le sel. Frottez les grains de riz avec vos mains, afin que le sel soit bien réparti, imprègne le riz, et que l'odeur caractéristique commence à s'échapper.
Vous allez me dire, quelle odeur ? ;o) Ben l'odeur du koji quand on se colle le nez dessus au départ. Il faut que vous la sentiez sans avoir à vous mettre le nez directement dessus.
Versez de l'eau sur le mélange de manière à immerger le riz, mélangez bien à la cuillère, et laissez gonfler un peu (une petite heure).
Quand le mélange a gonflé et que l'eau n'affleure plus en surface, versez le shio-koji dans un récipient en vue de la fermentation : un plat en verre, un bocal à large ouverture, ou encore un saladier. Ajoutez de l'eau jusqu'à la surface des grains de riz, mélangez à nouveau, couvrez le récipient avec un film étirable ou un couvercle, et laissez fermenter à température ambiante.
La fermentation se fera en environ 5-7 jours en été, et plutôt 2 semaines en hiver. Mélangez votre shio-koji tous les jours, afin que la fermentation soit bien homogène.
Quand le shio-koji est prêt, mettez-le en bocal et conservez-le au frigo. Je n'ai pas eu l'occasion de garder mon shio-koji plus d'un mois car je m'en sers vraiment tous les jours, mais je pense qu'il tiendrait bien 2 mois au froid - celui du commerce se conserve 6 mois.
L'expérience vous tente ?
Caroline